vendredi 21 octobre 2011

En défense de Homer


L’idée de formuler une défense de Homer m’est venue en lisant cette description à son sujet : « Homer incarne le stéréotype américain de la classe ouvrière : il est vulgaire, en surpoids, incompétent, maladroit, paresseux et ignorant; cependant, il est essentiellement un homme honnête et il est profondément dévoué à sa famille. » Bien souvent, quand on pense à Homer, on pense au nombre et à la gravité de ses vices. On pense à tous les tourments que doivent endurer sa femme Marge et ses enfants ; particulièrement Bart, qu’il étrangle régulièrement. L’ensemble de son entourage souffre sévèrement des diverses grossièretés et excentricités que Homer lui impose.

Homer n’est certes pas un citoyen modèle mais, si on se pose la question sérieusement, il est loin d’être un proche indésirable. Pour s’en rendre compte, il suffit d’inverser ses vices et ses vertus. Il suffit d’imaginer un homme raffiné, athlétique, compétent, adroit, travailleur et érudit mais essentiellement malhonnête et profondément indifférent à sa famille. Imaginons cet homme, et comparons-le à Homer. Lequel est le meilleur ami? Lequel est le meilleur père? Les vices de Homer impliquent de graves désagréments pour tous ceux qu’il côtoie mais ils ne font pas de lui une mauvaise personne.

Plus sérieusement encore, d’un point de vue philosophique, on pourrait dire que Homer est aussi bon qu’il peut l’être. C’est-à-dire que, là où ses vices paraissent être largement dus à un environnement défavorable et à un bagage génétique médiocre, ses vertus, rares mais cruciales, relèvent des aspects de la personnalité que l’on attribue traditionnellement au libre-arbitre : les valeurs les plus fondamentales. Il n’a pas consciemment choisi d’être vulgaire, en surpoids, incompétent, maladroit, paresseux et ignorant. Il ne choisit pas consciemment d’être souvent négligeant et insouciant envers ses proches. Mais dès qu’il prend conscience du mal qu’il cause à ses proches, ou du bien qu’il ne leur procure pas, il devient l’homme le plus courageux et le plus acharné du monde pour réparer ses torts. On s’amuse bien en se moquant de ses vices extravagants, mais on devrait aussi s’humilier devant l’intensité de ses vertus.